LA TRAVERSÉE DE L’ERRANCE
LA TRAVESÍA DE LA ERRANCIA
(2003-2006)
En el envés de los párpados
una tiza dibuja
la indescifrable huella
el destino sin clave
de tu presencia en el mundo.
La noche vigila sobre la palabra abandonada.
Como por motín
un silencio explota en tu cabeza.
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À l’envers des paupières
une craie dessine
l’indéchiffrable trace
le destin sans clé
de ta présence au monde.
La nuit veille sur la parole abandonnée.
Comme par émeute
un silence explose dans ta tête.
Intentar retener lo informulable
como el agua en el cuenco de las manos
para ver pasar un secreto del mundo
o nada más que su reflejo
su trazo de rayo en el agua
antes que todo se derrumbe y desaparezca
en el polvo donde marchas.
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Tenter de retenir l’informulable
comme de l’eau au creux des mains
pour y voir passer un secret du monde
ou rien que son reflet
sa trace d’éclair dans l’eau
avant que tout ne coule et disparaisse
dans la poussière où tu marches.
La palabra, fisura del espíritu y del cuerpo ? Sería necesario poder arreglarse sin las palabras sin renunciar, sin que se trate de encerrarse en el mutismo.
¿Dónde templar la palabra en respuesta al desastre y encontrar el lazo con el espíritu ?
Tener las uñas capaces de deshacer los nudos del grito, la aguja de horadar la bolsa de lágrimas que apaciguaran las voces subterráneas, las voces que rondan bajo los crepúsculos amargos y se infiltran en el nido del sueño, las voces borradas, la voz de tu voz en mi voz muda.
Si el grito, las lágrimas pueden apaciguar la palabra. Uno quisiera que algo explote, y deje lugar al vacío, uno quisiera que desaparezca aquello que entumece nuestra pesadez.
¿Dónde templar el cuerpo en respuesta al desastre y encontrar el lazo con el mundo ?
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La parole, fêlure de l’esprit et du corps ? Il faudrait pouvoir se passer des mots sans avoir à y renoncer, sans qu’il s’agisse de s’enfermer dans le mutisme.
Où tremper la parole en réponse au désastre et retrouver le lien avec l’esprit ?
Avoir les ongles capables de défaire les nœuds du cri, l’aiguille de percer la poche de larmes qui soulageraient les voix souterraines, les voix qui rôdent sous les crépuscules amers et s’infiltrent dans le nid du sommeil, les voix effacées, les voix de ta voix dans ma voix muette.
Si le cri, les larmes pouvaient soulager la parole. On voudrait que quelque chose crève, et laisse une place au vide, on voudrait que disparaisse cette chose qui engourdie notre pesanteur.
Où tremper le corps en réponse au désastre et retrouver le lien avec le monde ?
Lo que se acarrea en el relincho petrificado de un caballo que rabia
en el agua fangosa de las calles sin asfalto donde penden rejas
que rodean su impotencia
baches y cobertores en hilachas de abrigo.
Y al fondo los restos de un templo que un árbol se obstina en cubrir.
Pequeñas casas chapotean
su abandono sin más tristeza
que lo real tiene al estropearse.
Sobre la farola se agitan todavía al viento bombillas muertas.
Escribir sobre una mesa volteada en el barro y la lluvia.
Escribir la impotencia de un relincho petrificado.
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Ce qui se charrie dans le hennissement pétrifié d’un cheval qui rage
dans l’eau fangeuse de rues sans asphalte où pendent des grilles
qui entourent son impuissance
bâches et couvertures en débris d’abri.
Et au fond les restes d’un temple qu’un arbre s’obstine à couvrir.
Des petites maisons pataugent
leur abandon sans plus de tristesse
pas plus que le réel en met à se délabrer.
Sur le lampadaire s’agitent encore au vent des ampoules mortes.
Ecrire sur une table renversée dans la boue et la pluie.
Ecrire l’impuissance d’un hennissement pétrifié.
El gusto de las provisiones
echa a perder el hambre del hombre
Sudando por adoquinar y por balizar el camino
él desfigura el vértigo de la danza
Obnubilado en escrutar el horizonte
él sabotea su mirada
Obsesionado por el cáculo y el desciframiento
de modernos augurios
él pisotea su simiente
Enemigo del tiempo
él lo gangrena.
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Le goût des provisions
gâte la faim de l’homme
Suant à paver et baliser le chemin
il défigure le vertige de la danse
Obnubilé à scruter l’horizon
il sabote son regard
Obsédé par le calcul et le déchiffrement
de modernes augures
il piétine sa semence
Ennemi du temps
il le gangrène.
Una silueta se aleja en la nieve
una sombra se afila
una huella bebida
Un sin nombre para el después
Nieve tu noche
se borra
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Une silhouette s’éloigne dans la neige
une ombre s’effile
une trace bue
Un sans nom pour l’après
Neige ta nuit
s’efface
Muerde en la muerte una niña
con bellos dientes
Y su risa glotona rie de la muerte.
Vanidad la vida dice su sonrisa
y alto su valor
Dice una niña
Más fácil es sin duda morir que vivir
pero no le diré el momento llegado.
Muerde en la muerte una niña
y canta su elogio de la vida
más difícil que nuestras letanías de apocalipsis.
Ella dice Detrás del miedo de la muerte
se esconde un miedo por la vida.
Una niña que muerde en la muerte
dice Tu muerte no será más que el espejo de tu vida.
En la muerte no hay más espejo.
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Une petite fille mord dans la mort
à belles dents
et son rire gourmand rit de la mort.
Son rire dit Vanité la vie
et haute sa valeur.
Une petite fille dit
Il est sans doute plus facile de mourir que de vivre
mais je ne vous le dirai pas le moment venu.
Une petite fille mord dans la mort
et chante son éloge de la vie
plus difficile que nos litanies d’apocalypses.
Elle dit Derrière la peur de la mort
se cache une peur de la vie.
Une petite fille qui mord dans la mort
dit Ta mort ne sera que le miroir de ta vie.
Dans la mort il n’y a plus de miroir.
a Li Qingzhao
Nosotros también bebemos
los ojos brindando
y es en ella en quien de súbito pienso
el alfiler que resbala de los cabellos en el abrazo
la traspiración ligera que moja su vestido
la seda que venda los pies
esta voz frágil en el agua del tiempo
y los rumores guerreros
la fuerza siempre vulnerable de la primavera que uno otea
en lucha con la nieve
el sollozo de las ruedas trazando la fisura sobre el camino que lleva
al éxodo al duelo la sacudida mirada que pende de la amarga nostalgia
una flor que pierde el fulgor de su rojo
como rojo borrado de los labios en la violencia de un beso
Acuérdate
En la pérdida en la gloria de las horas robadas
por la intensidad el don de un instante
destello de luna olor de canelero cuerdas de cítara
de una ebriedad, aquella del vino que ella tanto ha amado
y de mucho más que del vino
dame tus ojos
húndamonos juntos como ella canta en esta copa
ese volcamiento que nos retarda el paciente abismo.
à Li Qingzhao
Nous aussi nous buvons
les yeux trinquant
et c’est à elle soudain que je pense
l’épingle qui glisse des cheveux dans l’étreinte
la transpiration légère qui mouille sa robe
la soie qui bande les pieds
cette voix fragile dans l’eau du temps
et les rumeurs guerrières
la force toujours vulnérable du printemps qu’on guette
en lutte avec la neige
le sanglot des roues traçant la fêlure sur le chemin qui mène
à l’exode au deuil le regard qui cahote pendu à l’amère nostalgie
une fleur qui perd le vif de son rouge
comme du rouge effacé des lèvres dans la violence d’un baiser
souviens-toi
à la perte à la gloire des heures volées
pour l’intensité le don d’un instant
éclat de lune odeur de cannelier cordes de cithare
d’une ivresse, celle du vin qu’elle a tant aimé
et de beaucoup plus que du vin
donne-moi tes yeux
plongeons ensemble comme elle chante dans cette coupe
ce renversement qui nous retarde le gouffre patient.
No tiene mi lengua palabras para decir
el ruido de las hojas en el viento.
Saborear la plenitud de no hacer nada.
Dejar zumbar la conciencia como hojas al viento.
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Ma langue n’a pas de mot pour dire
le bruit des feuilles dans le vent.
Goûter la plénitude de ne rien faire.
Laisser la conscience bruire comme des feuilles dans le vent.
Haces resbalar el rayo de tu vestido
verifico el estado de la noche
vamos a beber un alcohol ligero y negro
opacarnos aun en la intimidad
la posible tristeza conjurar
por la suerte de una separación sin adios
conjugar nuestros vértigos o las indolencias
vez que presentimos la última
y que olvidamos, que vivimos
y es todo.
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Tu fais glisser l’éclair de ta robe
je vérifie l’état de la nuit
nous allons boire un alcool léger et noir
encore nous opacifier dans l’intime
conjurer la tristesse possible
par la chance d’une séparation sans adieu
conjuguer nos vertiges ou les nonchalances
fois qu’on pressent la dernière
et qu’on oublie, qu’on vit
et c’est tout.
Rojas uñas de los pies como el vuelo de tu falda
elevándola blanca sobre tu tatuada pierna
la otra desnuda hasta la rodilla me fascinan
aunque no alcanzan a borrarme tu rostro
donde caigo y me libero.
Festejamos la belleza del vicio sin dañarnos
mientras que un asno de azules ojos falsifica la Historia.
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Ongles de pied rouges comme la frange de ta jupe
la relevant blanche sur ta jambe tatouée
l’autre nue jusqu’au genou si me fascinent
n’arrivent pas à m’effacer ton visage
où je tombe et me libère.
Et nous fêtons la beauté du vice sans nous nuire
tandis qu’un âne aux yeux bleus falsifie l’Histoire.
No he hecho más que pasar.
Ella cortaba ramitas para alimentar un fuego donde calentaba su tetera negra de brea. En la boca un cigarrillo, ella se apartaba y gesticulaba un poco para no ahumarse más los ojos. Sus manos, manos polvorientas que uno hubiera querido limpiar suavemente, y luego lamer. Un rostro sin cuidado, brutalmente bello como las piedras que la rodean, de golpe bello, tenaz, y que ha sabido guardar una dulzura secreta.
No he hecho más que pasar, y sin embargo, tenía un terrible deseo de quedarme en ese rostro, de acostar ilusoriamente el final de mi errancia.
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Je n’ai fait que passer.
Elle coupait des branchettes pour alimenter un feu où chauffait sa théière noire de suie. À la bouche une cigarette, elle s’écartait et grimaçait un peu pour ne pas s’enfumer les yeux davantage. Ses mains, des mains poussiéreuses qu’on aimerait nettoyer doucement, et puis lécher. Un visage sans soin, brutalement beau comme les pierres qui l’entourent, d’emblée beau, tenace, et qui a su garder le secret d’une douceur.
Je n’ai fait que passer, et pourtant, j’avais une terrible envie de rester dans ce visage, d’y coucher illusoirement la fin de mon errance.
Has soñado siempre ser un viajero sin valija
regresar con las manos vacías de un muy lejano país
a un lugar que aun tu juegas a crear
como si fuera el tuyo.
Pero no eres un viajero
y tu equipaje es siempre demasiado pesado.
Y aun partes
con el secreto deseo
de exparcir en la ruta tu valija.
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Tu as toujours rêvé d’être un voyageur sans valise
de revenir les mains vides d’un trop loin pays
à un lieu que tu joues encore à faire
comme s’il était le tien.
Mais tu n’es pas un voyageur
et ton bagage est toujours trop lourd.
Et encore tu pars
avec l’envie secrète
d’éparpiller en route ta valise.
El viento que da a las agujas de pino
un temblor eléctrico.
El rumor de los lagos.
Esta gente que vive más lejos, siempre más lejos
en el crecimiento continúo de la ciudad
sobre las pendientes.
Trocar el trozo por un tiquete.
El fantasma de un arca.
La lenta deriva de las existencias.
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Le vent qui donne aux aiguilles de pins
un frémissement électrique.
La rumeur des lacs.
Ces gens qui habitent plus loin, toujours plus loin
dans la croissance continuelle de la ville
sur les pentes.
Troquer le lopin contre un ticket.
Le fantôme d’une arche.
La lente dérive des existences.
Tus senos que inclinan en los yaros
una plena brasada
déjame recoger el olor tu piel
la página arrugada
déjame respirar tus senos
apagar esas bocanadas de no sé qué
que adentro ahogan
entregar las armas del miedo
sostenerme vulnerable en la distancia
déjame pasar la cortina de tus cabellos
aprender a aceptar
sin resignación
déjame volcar en tu enigma
y perder todas mis posesiones
déjame partir
alcanzar el desapego
sin la indiferencia
déjame vacío.
▼
Tes seins qui penchent dans les arums
toute une brassée
laisse-moi cueillir l’odeur ta peau
la page chiffonnée
laisse-moi respirer tes seins
éteindre ces bouffées de je ne sais quoi
qui dedans étouffent
rendre les armes de la peur
me tenir vulnérable dans l’écart
laisse-moi passer le rideau de tes cheveux
apprendre à accepter
sans résignation
laisse-moi chavirer dans ton énigme
et perdre toutes mes possessions
laisse-moi partir
atteindre le détachement
sans l’indifférence
laisse-moi vide.
Stéphane Chaumet nació en 1971 en Dunkerque (Francia), al bordo del mar. Ha vivido en Estados-Unidos, en México, Siria y China. Autor de cuatro libros de poesía La mordedura y la piedra (La morsure et la pierre), En la desnudez del tiempo (Dans la nudité du temps), Urbanas miniaturas (Urbaines miniatures) y La travesía de la errancia (La traversée de l’errance), y de un relato El paraíso de los velos (Au bonheur des voiles) que cuenta su experiencia en Siria.
Una selección de poemas traducidos al español por la poeta Myriam Montoya aparecerá bajo el titulo Donde la noche franquea en 2008 (ediciones El Perro y la Rana, Caracas) así como su último libro La travesía de la errancia (éditions Alforja, Mexico).
